Planète « mourante » : les industries culturelles doivent réagir

wwf_greentertainmentLe Panda du WWF nous rappelle à la réalité alors que les conclusions du rapport « Planète vivante » sont une nouvelle fois inquiétantes. L’occasion pour Greentertainment de rappeler le pourquoi de son existence, de participer à la recherche de modèles et de pratiques plus durables et viables pour les industries culturelles.

Souvent réduit à n’être qu’un défenseur des animaux, le WWF est en réalité un acteur de développement local et international dont le point de départ est la protection de l’environnement.En d’autres termes, il vise à faire évoluer les structures mentales et sociétales pour arriver à un développement plus en phase avec un avenir durable.

Réduction de l’empreinte environnementale, gestion plus équilibrée des ressources, meilleure intégration des acteurs participant à la création de valeur, vision et réflexions à long terme, … sont autant de principes qui animent également Greentertainment. Constat et poussée d’optimisme !

Un constat global alarmant

L’indice « Planète vivante », qui mesure la biodiversité et renseigne sur l' »état écologique de la planète » donne des chiffres et surtout une tendance inquiétante :
– Les populations de vertébrés (amphibiens, mammifères, oiseaux, poissons, reptiles) ont chuté de 58% entre 1970 et 2012. Chutant de plus de 2% par an, à un rythme qui ne semble pas ralentir.
– Les espèces vertébrées terrestres ont vu chuter leur population de plus 38%, et les espèces marines de plus de 36% en 40 ans, soit plus d’un tiers des effectifs.
– Les espèces vertébrées d’eau douce, comme les grenouilles ont vu leurs populations diminuer de plus de 81%.

Pour bien comprendre ce que représente ces chiffres, appliquons ces proportions à une ville de 100.000 habitants, comme par exemple Nancy (hors agglomération). En 40 ans, elle aurait perdu plus de 42.000 habitants (si l’on considère tous les vertébrés), 38.000 habitants (espèces terrestres) ou 36.000 habitants (espèces marines). Et si tous ses habitants étaient des espèces d’eau douce : 81.000 habitants auraient disparu, soit plus de 4/5e de sa population !

Mais il ne s’agit que de symptômes, d’évènements, qui traduisent des phénomènes structurels beaucoup plus importants.

L’Homme, principal moteur des dégradations

En cause, on retrouve 5 phénomènes bien connus, tous la conséquence de l’action humaine :
– perte et dégradation de l’habitat
– surexploitation des espèces
– pollution
– espèces invasives et maladies
– changement climatique

Malheureusement, ces phénomènes connaissent une « grande accélération » depuis les années 1970.

Et les conséquences de cette accélération sont sans appel : « les conditions écologiques ayant favorisé notre développement et notre croissance commencent aujourd’hui à se détériorer ». Concrètement, l’homme demande plus que ce que la planète est capable de donner : en l’espèce, il faudrait 1,6 Terre pour soutenir nos besoins.schema_limites_planétaires_wwf_greentertainment

Et c’est ainsi que comme le montre le schéma ci-contre, nos modes de consommation et de production mondiaux ont fini par exposer les  systèmes naturels et humains à un risque toujours plus grand ; dépassant déjà un « champ d’action sécurisé » (en vert).

Et face à cette situation, les industries culturelles louées pour le caractère innovant et avant-gardiste ont une influence, une responsabilité et peut-être une obligation de réagir.

Pourquoi les industries culturelles doivent réagir ?

L’empreinte écologique (notamment carbonée) montre que nous européens (mais également américains, australiens, moyen-orientaux, …) exerçons une « pression disproportionnée sur la nature en s’appropriant bien plus que la juste part des ressources de la Terre qui [nous] revient ».

A l’instar de biens d’autres secteurs industriels comme récemment le transport maritime et l’aéronautique, les industries culturelles (dans leur acception la plus large, c’est-à-dire du divertissement) gagneraient à chercher de nouvelles solutions et à développer de nouveaux modèles. Aussi, en partant du principe que des efforts sont toujours possibles, c’est l’ensemble de ces industries du divertissement qui sortiraient grandies, armées pour entrer pleinement dans le XXIe siècle.

En effet, derrière les questions environnementales, c’est la volonté d’affirmer une nouvelle vision plus « durable », « soutenable », à « long terme » que celle qui domine aujourd’hui. Il ne s’agit pas uniquement de moins polluer, mais également de répondre à des enjeux industriels, c’est-à-dire économique ; et là encore de nouveaux modèles peuvent être pertinents. De nombreuses initiatives montrent une prise de conscience au sein de ces industries : par les professionnels, sur les processus et les infrastructures de création, de production et d’exploitation ou encore dans la manière d’aborder les publics.

Des gestes simples comme catalyseurs

Des premiers gestes très simples, avant même de penser à repenser les process de travail spécifiques à ces industries, sont de transposer ses habitudes de citoyen dans ses habitudes professionnelles. Des gestes aussi basiques que le tri sélectif ou la limitation des impressions permettent non seulement de réaliser des économies mais surtout de créer une dynamique positive au sein de l’organisation.

Il est entendu que ces premiers gestes – de bon sens – ne sont pas une finalité, mais une mise en jambe, un exercice simple qui permet de s’attaquer à d’autres process ou organisations, ceux-là beaucoup plus spécifiques aux industries culturelles. C’est ainsi que les studios Universal ont par exemple banni l’utilisation d’emballage plastique pour le catering sur les tournages ou que le BAFTA (British Academy of Film and Television Art) met à disposition des professionnels du cinéma un outil de calcul du bilan carbone pour les tournages (Albert). Plus qu’un enjeu environnemental, le changement de paradigme devient progressivement un enjeu industriel, et dès 2010, le CEO du UK Film Council John Woodward insistait sur le fait que « si l’industrie du cinéma britannique peut devenir leader dans le durable, alors nous aurons un réel avantage compétitif à l’international pour les années à venir ».

Et le temps presse, car comme le rappelle le rapport : « ce qui est certain, c’est que les efforts à mener pour  répondre  aux  risques  encourus  à  l’échelle  planétaire  s’annoncent   autrement  plus  ardus  que  ceux  déjà  consentis ».

Innover pour sur les produits culturels, a l’avant-garde du durable !

Les industries culturelles sont considérées comme des industries de l’innovation, du fait de la nature même de leur produit. Nouvelles sorties cinéma, nouveaux albums, nouvelles expositions, nouveaux jeu-vidéos, … les exemples sont nombreux et la demande de « nouveauté », d’innovation est très forte.

schema_wwf2_greentertainment_modeleCette capacité à constamment réinventer de nouveaux produits est une bonne chose et doit aujourd’hui irriguer – si ce n’est la refonte – tout du moins l’évolution de certains modèles, de certaines pratiques ou modes d’organisations [liés aux industries culturels].

Contrairement aux idées reçues, l’écologie n’est pas du tout l’ennemi de l’économie mais une autre vision de celle-ci. L’objectif doit rester le profit par la création, mais la viabilité et le développement économique de l’entreprise doivent être pensés sur le long terme. Ce qui nécessite de mener des actions sur le court et le moyen termes.

Face à l’urgence de ce constat, les industries culturelles peuvent et doivent se mobiliser en faveur de nouveaux modèles. Au-delà de jouer sur leur puissance symbolique à montrer une nouvelle voie – cinéma, arts plastiques, … – pourquoi ne pas aller au bout de cette logique et se l’approprier ?

 

2 réactions sur “ Planète « mourante » : les industries culturelles doivent réagir ”

  1. Juste comme ça Réponse

    Pourquoi les 2 « r » à « mourrante »?
    Sinon, concernant l’article : ce qui serait intéressant, c’est de savoir quels gestes concernent les industries culturelles en particulier? Y a-t-il une écologie propre à la culture? au cinéma etc? Et concrètement, la course à la nouveauté ne concerne pas seulement la culture, donc en quoi les industries culturelles sont plus aptes à « irriguer l’évolution de certains modèles, de certaines pratiques ou modes d’organisations » ? Et de quels modèles, pratiques etc. parlons-nous? C’est dommage que tout paraisse si abstrait…

    • Ivan EVE Auteur ArticleRéponse

      Bonjour,
      Merci pour votre commentaire, qui me permet de clarifier mon propos.
      Avant de tenter de vous répondre point par point, je tenais à préciser deux choses :
      *ce site vise avant tout à réfléchir à l’avenir des industries culturelles (un tout loin d’être homogène), et va puiser son inspiration du côté du « développement durable », dont l’écologie est une des composantes. Créé tout récemment, ce site repose sur le travail bénévole de personnes concernées par ces sujets.
      *cet article avait surtout pour objectif de réagir au rapport Planète Vivante (du WWF), dont les conclusions selon moi alarmantes montrent l’urgence qu’ont les professionnels des industries culturelles à réagir ; chose qu’ils font déjà depuis relativement longtemps, comme en atteste le foisonnement d’initiatives. D’une certaine manière, en simplifiant, cet article dit : « ouvrez le débat, et si c’est déjà fait, ne le refermez surtout pas ».
      Maintenant, pour vos questions :
      => Existe-t-il une écologie propre à la culture ? Personnellement je ne le pense pas, mais ce site traite des industries culturelles et n’a pas vocation à parler de l’écologie en général. Malgré tout, à l’image de n’importe quel autre secteur industriel, les industries culturelles ont des spécificités et des contraintes particulières qu’il s’agit de prendre en compte si l’on veut réfléchir à ce qui peut être fait. Et au sein de ces industries, chaque secteur (cinéma, livre, …) a des modes de fonctionnement différents. C’est pourquoi cet article n’y répond pas mais dit que la question de ce qui peut être fait doit être posée.
      => Concernant la « course à la nouveauté ». Il est entendu que les industries culturelles n’ont pas le monopole de la « nouveauté » ou de « l’innovation », mais leur modèle économique repose en grande partie sur leur capacité à innover et à produire du « nouveau ». Aujourd’hui, cette capacité à innover doit également se traduire dans les processus, et pas seulement dans les produits. L’idée, comme vous l’avez très probablement compris maintenant, est de s’intéresser au comment dans de prochains articles.
      => Concernant les gestes : c’est justement l’un des objectifs de ce site que de promouvoir des initiatives très concrètes – sur la base de retours d’expériences -. Si vous entendez des gestes quotidien, alors une des premières choses à faire est de transposer ceux que vous êtes appelé(e) à faire en tant que citoyen(ne) dans votre environnement professionnel (tri, économie d’énergie, …). Maintenant, l’idée est ici de dépasser ce stade, qui n’est pour moi qu’un catalyseur, qu’une manière de se « mettre en jambe » et d’aller plus loin d’un point de vue structurel. Sur un tournage de cinéma, on peut par exemple penser à de très nombreux « petits » gestes très concrets comme l’utilisation de piles rechargeables, de distributeur d’eau plutôt que de bouteille, en favorisant l’usage de véhicules électriques ou des générateurs solaires plutôt que diesel … et des sociétés comme Greenshoot au R-U ou Ecoprod en France apportent des réponses concrètes.
      => enfin sur le double « r », certaines coquilles rajoutent de l’emphase ; corrigée depuis, merci !

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